
La lettre, qui date curieusement du 18 décembre 2013, a été rendue publique par M. Thiam ce dimanche, sans doute encouragé par le sort positif donné à son combat pour la baisse du loyer à travers une loi adoptée par les députés et promulguée en ce mois de janvier par le président Macky Sall.
Dans sa missive au président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, le professeur Iba Der Thiam demande des explications sur le dossier des hectares de terrains à attribués au groupe immobilier privé Namora pour la construction de logements sociaux dans le cadre du Plan Jaxaay. Les logements sont destinés aux sinistrés des inondations dans la banlieue dakaroise, mais également à des Sénégalais de la diaspora demandeurs.
Mais voilà, le groupe Namora est cité dans des affaires qui fleurent bon l’arnaque dénoncée aussi bien par des Sénégalais de la diaspora que par des résidents au Sénégal ayant souscrit et mis leur argent pour acquérir un logement. « Le Groupe, profitant des déplacements des autorités, avait contacté de nombreux Sénégalais et collecté beaucoup de fonds de souscripteurs, avec la promesse que les villas seraient livrées dans un délai de 6 mois, au plus tard, clés en main. Depuis Mars2012, le dossier n’a pas avancé », a constaté celui qui a était affublé du sobriquet de « député du peuple ».
« Au moment où le gouvernement va prendre en main, la question du foncier dans notre pays, qu’est devenu le Groupe Namora ? », s’interroge le député. Lequel veut en outre savoir ce que sont devenus les hectares qui avaient été alloués à la société, et que vont devenir les villas qui avaient été déjà construites, « afin que les souscripteurs ne voient pas leurs investissements perdus à tout jamais ». Il demande aussi ce que compte faire le gouvernement pour « prendre en main ce dossier et rassurer tous ceux qui avaient placé leur espoir au Groupe Namora ».
En effet, dans un article publié sur son site le 19 Août 2011, Dakaractu relevait que le Groupe Namora était détenu à parts égales par Alioune Badara Badiane et Taboulé Sylla. Mais ajoutait que ce groupe s’est disloqué avant la sortie du bail lui attribuant 50 ha de Tivaouane Peulh. La même source notait qu’un rapport de la Cour des comptes a demandé au ministère de l’Economie et des Finances de le résilier.
Continuité ou rupture
Il n’en a vraisemblablement rien était, puisque – continuité au lieu de rupture – le régime de Macky Sall a adoubé le projet de Namora. Interrogé en mars 2013 par L’Observateur, Alioune Badara Badiane confiait avoir vendu 70% des actions de la société à des Malaisiens et donner l’ordre à ses collaborateurs de rembourser ceux des souscripteurs qui le désirent. « (Les Malaisiens) vont terminer les 3000 logements de Tivaouane Peulh et les 3000 autres de Diamniadio. D’ailleurs, les Sénégalais de France auront leurs clés d’ici à la fin de l’année », soutenait M. Badiane, alors objet de plusieurs plaintes.
Las ! Des promesses semble-t-il non tenues suscitant la curiosité du député Iba Der Thiam.
Au demeurant, ce cas est symptomatique de l’affairisme immobilier par la mise à l’écart, sous Abdoulaye Wade, des sociétés publiques immobilières (Sicap et SN-HLM) au profit de promoteurs privés gratuitement attributaires de plusieurs hectares de terrains sous formes de baux, souvent de choix, dans la région de Dakar. Se faisant, il a contribué à l’enrichissement sans coup férir de personnes avec la complicité de gens haut placés dans les sphères du pouvoir wadien.
Depuis son arrivée aux affaires, le président Macky Sall clame à longueur de conseils des ministres sa volonté de réhabiliter l’habitat social en redonnant aux sociétés publiques dédiés les moyens (fonciers et financiers) d’y parvenir. Il tient dans le cas de Namora l’occasion de démontrer sa bonne foi en l’espèce.